1987 - Jean Cocteau, Les enfants terribles

Les enfants terriblesEmprunté à la bibliothèque.

Le précédent billet sur Boris Vian a suscité des commentaires qui ont tourné autour de la question du dilettantisme dont l’écrivain était une figure : un touche-à-tout pas forcément de génie, qui prend plaisir à s’essayer à diverses expressions artistiques, à éparpiller son talent, au détriment de son approfondissement.

Que ce dilettantisme soit un choix existentiel (Vian atteint d’une maladie incurable sait qu’il n’a pas le temps de faire œuvre), ou philosophique (que signifie faire œuvre au sortir des guerres les plus meurtrières de l’histoire), il a souvent pour conséquence de choisir sa vie comme lieu de l’œuvre et d’aboutir au culte de l’artiste. Le dilettantisme (aussi superbement nommé slasher pour les / qu’il accumule comme autant de particules qu’il ajoute à son nom : écrivain/graphiste/comédien/vidéaste…) est en vogue car il s’accommode bien avec le spectacle et semble aisé à reproduire : on ne parle pas travail, renoncement, sacrifice… et on n’a pas trop à faire ses preuves.

Il se trouve que je lus Les enfants terribles de Cocteau à la suite de L’écume des jours. Cocteau était aussi un dilettante, mais plus de caractère que par choix. Son dilettantisme ne l’empêcha pas d’ailleurs d’être très productif, même s’il nous intéresse davantage pour sa vie : lisez un texte sur n’importe quel grand artiste du premier XXème siècle, vous verrez passer un ange, le prince des poÊtes Jean Cocteau. Prince des poètes, il l’était au sens où il joua un rôle d’inspirateur et de catalyseur auprès d’un grand nombre d’artistes. A combien d’œuvres et de spectacle il apporta une touche de grâce, que l’on retrouve dans ses romans.

Une rumeur flatteuse n’accompagnait pas Les enfants terribles comme elle le faisait pour L’écume des jours, et je crois bien que si j’empruntai ce roman à la bibliothèque, ce fut autant pour la couverture avec le dessin d’un visage double, qui m’attira, que pour le titre qui m’intrigua, où je devais voir l’origine de l’expression-scie des médias de cette époque, « l’enfant terrible de… » (compléter librement). Du roman, je me souviens de l’amour entre un frère et une sœur livrés à eux-mêmes, du monde imaginaire qu’ils s’inventent, d’une fin tragique. Une histoire assez proche, finalement, de celle de L’écume des jours, mais qui me parut beaucoup moins artificielle, et me plut bien davantage.

Alors pourquoi, vingt-cinq plus tard, ai-je un souvenir plus vif du roman que j’ai le moins apprécié ? L’attirail onirique de L’écume des jours, par le déplaisir qu’il me causa, m’aida à prendre conscience d’un de mes dégoûts et en cela, augmenta la connaissance de moi-même. Devenu un repère, le roman s’ancra plus facilement dans ma mémoire. Celui de Cocteau me donna sur le moment un réel plaisir de lecture, mais pas si intense pour, à l’inverse, me révéler un goût décisif. D’où, peut-être, son étiolement dans la mémoire.

Deux ans plus tard, je lus sa pièce La machine infernale. Il ne m’en reste qu’un « Ah oui ! » à la lecture de la notice de Wikipédia : il revisite le mythe d’Œdipe. J’y reviendrai à l’occasion d’un prochain billet sur la lecture des pièces de théâtre.

Commentaires

1. Le mercredi 10 juillet 2013, 19:44 par Ph. B.

Félicitations pour le projet original de votre blog... pour ce qui concerne Cocteau, je vous recommande chaleureusement la visite de sa maison-musée de Milly-la-Forêt... le cadre est bucolique... elle offre une riche collection de dessins... manuscrits... objets... de l'écrivain et comme vous le dites, aller chez Cocteau c'est retrouver les figures majeures de l'art du siècle dernier... un excellent souvenir !

2. Le mercredi 10 juillet 2013, 19:46 par Véronique Hallereau

Merci pour le compliment et bienvenue sur mon blog ! J'ai effectivement entendu dire le plus grand bien de ce musée. Je garde précieusement ce conseil.

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