Le maillage des lectures - Mot-clé - Sciences physiquesAutobiographie de mes lectures.2022-03-07T20:19:23+01:00Véronique Hallereauurn:md5:6551cf8fc6b6706899240dddee7d97eaDotclear2007 - Etienne Klein, Les tactiques de Chronosurn:md5:62fcd02c699a543ec97974317545b4092017-01-27T10:48:00+01:002021-03-26T12:30:20+01:00Véronique HallereauLectures d'âge adulteEtienne KleinFrançois JullienSciences physiques<p><a title="Chronos" href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/lemaillage/public/Couvertures/.Chronos_s.jpg"><img title="Chronos" style="margin: 0 1em 1em 0; float: left;" alt="Chronos" src="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/lemaillage/public/Couvertures/.Chronos_s.jpg" /></a><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt;">Acheté, lu aussitôt, relu en 2013.</span></p>
<span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt;">« Prenons le temps de savourer ce moment
hors du temps ». Le professeur de yoga accompagne de paroles la
respiration régulière des élèves. Nous faisons « la barque » ou « le
guetteur », postures peu naturelles ; malgré cela, par l’attention soutenue
que nous portons à notre respiration, nous arrivons à retrouver une certaine
aisance. La phrase du professeur, néanmoins, me distrait un instant de ma
respiration. Bien que je comprenne ce qu’elle signifie, son absurdité me frappe !
Je pense alors immédiatement à ma lecture des <em style="mso-bidi-font-style: normal;">Tactiques de Chronos</em> d’Etienne Klein, grâce à laquelle je suis devenue sensible
à ces illogismes qui abondent dans nos paroles dès que nous parlons du temps.</span> <p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt;">
J’entendis parler de ce livre à la radio, à peu près au moment
de sa publication ; je ne sais plus s’il s’agissait d’un entretien avec
Etienne Klein lui-même, auquel cas son goût pour la littérature, et sa capacité
à vulgariser des sujets de science physique, eurent certainement un rôle dans
ma décision d’acheter son livre et de le lire. J’en aimai en tout cas le titre ;
et le thème du temps m'intéressait. Je le lus deux fois. </span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt;">La deuxième fois, ayant décidé <a href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/2001-Fran%C3%A7ois-Jullien%2C-Du-temps">d’approfondir ma connaissance du
sujet</a>, je pris des notes, essentiellement sur le temps comme réalité physique,
et sur les différentes théories scientifiques pour tenter de le définir. Je n’ai
pas tout compris de cette partie du livre. La théorie des cordes, par exemple,
en vogue pour expliquer ce qu’est le temps, m’est restée bien obscure. Je constate
également que la prise de notes ne m’a pas permis de retenir précisément ce qu’écrit
le physicien. J’ai beau avoir noté ce que signifie la théorie générale de la
relativité, je suis incapable de me l’expliquer… Il faudrait que je rouvre mon
carnet. C’est une chose qui m’arrive souvent quand je lis des livres d’idées :
dans le meilleur des cas, une compréhension passive à la lecture, une idée
générale et confuse gardée en mémoire, et le fait de savoir où retrouver ces
idées si je les recherche plus tard. Bien que j’aie retenu quelques notions importantes liées au temps, l'irréversibilité, la causalité, il n’y a
pas d’appropriation réelle du savoir. Je ne fais pas ce que je faisais
étudiante : je ne cherche pas à mémoriser de manière active. Seuls se
déposent en moi quelques détails. </span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt;">Et ces détails proviennent plutôt de ma première lecture, alors
qu’elle est plus ancienne. Elle s’était davantage arrêtée à ce que Klein
appelait notre tendance à "habiller" le temps de notions qui, pour aller avec lui, ne se confondent pas avec lui. Nous avons tendance, en effet, à
confondre par exemple le temps avec les événements qui ont lieu dans le temps.
L’expression « temps cyclique » désigne ainsi le fait que les mêmes
événements reviennent, non que le temps en lui-même revienne (ce qui
signifierait que le futur serait déjà passé, et donc que la causalité n’existerait
pas). Ou bien à confondre le temps avec ce qui le mesure. Klein se moquait
ainsi d’un auteur de science-fiction qui, pour montrer que le temps s’était
arrêté, avait écrit que les aiguilles de l’horloge s’étaient arrêtées ! Le
temps est ce qui permet au monde d’être : que le temps s’arrête, nous cessons d'être. Nous confondons également souvent le temps avec
ses effets, quand nous disons que le temps s’en va, alors que, l’écrivait Ronsard,
« le temps s’en va/ hélas, non, nous nous en allons ». Nous confondons
enfin le temps avec la perception que nous en avons, perception changeante,
parfois le temps passe vite, parfois il s’étire… Toutes ces questions de
vocabulaire, de perception subjective du temps, sont du livre ce qui eut le plus de
retentissement en moi. Et elles m’ont rendue très sensible à notre façon de
parler du temps. </span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt;">D’où ce rappel lorsque j’entendis cette phrase du professeur de
yoga : « Prenons le temps de savourer ce moment hors du temps. » Je me fis la réflexion que nous – la phrase du professeur
reflétait une façon culturelle de parler du temps, ça c’est un souvenir de ma
lecture de <a href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/2014-Fran%C3%A7ois-Jullien%2C-Du-temps-%282%29"><strong>« <em>Du temps</em> »</strong></a> de François Jullien – confondions tellement
le temps avec le mouvement, car le mouvement est ce qui nous permet de mesurer le temps, et avec le changement (effet possible du temps, et très réel sur nos
vies), que lorsque nous sommes immobiles, attentifs à notre respiration, qui
est une sorte de pulsation intime du temps, et en conséquence particulièrement
disponibles au moment présent, voilà que nous serions transportés « hors du
temps » ! Etonnant paradoxe, qui montre à quel point nous sommes
totalement prisonniers d’une conception du temps où le présent n’existe pas,
instant à peine arrivé qu’il est déjà passé. Et même un professeur de yoga,
initié à une philosophie indienne très consciente de notre inscription dans le
présent, s’empêtre dans notre vocabulaire courant, inadapté à une pensée du
présent. </span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt;"><br /></span></p>http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/2007-Etienne-Klein%2C-Les-tactiques-de-Chronos#comment-formhttp://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/feed/atom/comments/84