Le maillage des lectures - Mot-clé - RimbaudAutobiographie de mes lectures.2022-03-07T20:19:23+01:00Véronique Hallereauurn:md5:6551cf8fc6b6706899240dddee7d97eaDotclear1989 - Arthur Rimbaud, Oeuvres complètesurn:md5:93a47bf40c7fd9edad75e90a9e2c44fc2015-03-07T11:50:00+01:002021-03-26T15:05:13+01:00Véronique HallereauLectures d'adolescenceClaudelFrédéric GrosLittérature françaisePatti SmithPaul GuthRimbaud<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;"> <a title="Rimbaud" href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/ http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/lemaillage/public/Couvertures/.Rimbaud_s.jpg"><img title="Rimbaud" style="margin: 0 1em 1em 0; float: left;" alt="Rimbaud" src="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/ http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/lemaillage/public/Couvertures/.Rimbaud_s.jpg" /></a>Acheté,
lu aussitôt.
</span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;">Dans un billet
précédent sur <a href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/1992-1997-Marcel-Proust%2C-A-la-recherche-du-temps-perdu"><em style="mso-bidi-font-style: normal;"><strong>A la recherche du temps
perdu</strong></em></a>, j’ai évoqué le cas des œuvres qui se présentaient en plusieurs
tomes, ce qui favorisait une lecture discontinue. Parfois un seul livre au contraire contient plusieurs
œuvres, voire les œuvres complètes d’un écrivain et encourage une lecture d'ensemble, voire une mauvaise lecture, comme il m'arriva avec celles de Rimbaud.</span></p> <p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;">Certaines
œuvres très courtes peuvent faire l’objet d’un ouvrage à elles seules :
des maisons d’édition se sont spécialisées dans ce genre de publication, qui
permet de vendre des livres à bas prix ou de fabriquer
de charmants micro-livres qui trouveront place sur une étagère décorative. Je
possède ainsi un beau et
minuscule <em style="mso-bidi-font-style: normal;">Hamlet</em> dans la langue originale, relié cuir noir et
or, acheté dans une librairie à Londres, je trouvais cela chic, jamais lu, et
resté unique dans son genre fétiche. L’option la
plus courante, cependant, est de regrouper plusieurs œuvres courtes pour
arriver à un nombre de pages convenable pour un livre. Des nouvelles, des
pièces de théâtre, des recueils de poésie, sont ainsi souvent publiés ensemble.
La plupart du temps, quand j’ai ce genre de livres dans ma bibliothèque, ce
sont des recueils de nouvelles. Maupassant, Poe, Tchékhov, Kafka ou Edna
O’Brien : lire plusieurs nouvelles à la suite, même si elles n’étaient pas
pensées pour constituer un ensemble, permet de se familiariser avec
l’imaginaire d’un écrivain, son style, ses sujets de prédilection, apprécier
leur unité ou leur diversité, la variété d’approche, etc.<span style="mso-spacerun: yes;"> </span>La lecture d’une nouvelle s’approfondit de la
lecture d’une autre. Elle peut aussi tendre à les confondre toutes : ma lecture des <a href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/1987-Voltaire%2C-Romans-et-contes"><strong><em>Romans et contes</em> </strong></a>de Voltaire, faite dans un unique volume, en fut un bon exemple.
</span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;">Un seul volume peut contenir l'œuvre intégrale d'un écrivain, notamment s'il est un poète mort jeune. J'achetai et lus ainsi en 1989, dans une petite édition les œuvres complètes de Rimbaud : <em>Poésies</em>, <em>Une saison en enfer, Les Illuminations</em>. Je ne suis pas sûre d'avoir lu toutes les poésies ; en revanche je lus les deux dernières œuvres d'affilée, parce qu'elles étaient présentées en un seul volume ! Je les lus ensemble pour terminer le livre que j'avais commencé comme on termine son assiette, comme si toute lecture ne pouvait être que narrative et continue. Je n'arrivais pas impatiente à me limiter au poème et à considérer celui-ci comme un tout, nécessitant plusieurs lectures pour être approfondi. Je ne pris pas le temps de me le mettre en bouche, je ne sus pas m'imprégner de ses sonorités, de ses vibrations, et me l'incorporer. Je ne compris donc rien à l'ensemble, et si peu dans les détails. Comme pour <a href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/lemaillagedeslectures/index.php/post/1987-Moli%C3%A8re%2C-Dom-Juan-et-Shakespeare%2C-Hamlet"><strong>ma lecture de pièces de théâtre</strong></a>, celle-ci demandait un guide. Le seul poème dont je me souvienne et qui m'ait marquée d'ailleurs, je l'avais lu en classe de français probablement de troisième, soit un an plus tôt, si j'accepte l'idée que j'eus l'idée d'acheter les poèmes de Rimbaud après l'avoir un peu étudié à l'école : il s'agit des <em>Effarés</em>. J'ai dû vérifier le titre de ce poème, ma mémoire proposait <em>Les affamés</em>, <em>Les agenouillés</em>... nous n'en sommes pas loin. Des enfants, en effet affamés, couverts de haillons et de neige, se blottissent (agenouillés ?) contre la chaleur rouge d'un soupirail d'où ils observent un boulanger cuisant le pain. Cette image s'est profondément ancrée en moi et je l'ai souvent revue quand, vivant à Moscou, je faisais un long détour par le froid pour aller à la boulangerie française qui avait ouvert et qui m'aida à supporter l'hiver. Gestes rituels de la cuisson du pain, sainteté du pain chaud nourrissant le corps et l'âme... <em>Les Effarés</em> sont pour moi, avec <em><strong><a href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/1987-Alexandre-Solj%C3%A9nitsyne%2C-Une-journ%C3%A9e-d-Ivan-Denissovitch">Une journée d'Ivan Denissovitch</a></strong></em>, le chant du pain. </span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;">Voilà mon Rimbaud ! Il est maigre et bien éloigné de l'imagerie traditionnelle du poète rebelle, maudit mais voyant, qu'un adolescent modèle doit vénérer comme le firent en leur temps, et c'est sans doute leur seul point commun, Paul Claudel et Patti Smith. L'adolescente que j'étais avait bien sa figure tutélaire de rebelle, mais il était chauve et barbu, orthodoxe et conservateur : on était loin du Rimbaud pour magazine et de son portrait de jeune éternel à la James Dean ou à la Che Guevara. L'identification du poète à ces icônes d'une jeunesse rebelle qui se consume en feu de paille me faisait suspecter beaucoup de conformisme dans l'affirmation d'un amour brûlant pour la poésie de Rimbaud, ce qui fit écran entre elle et moi : il est des louanges dont le caractère convenu et trop partagé vous éloignent d'une œuvre. Ou bien me vengeais-je ainsi de l'échec d'une lecture, en me moquant de ce que je considérais comme une pose ? Je lus avec joie l'article plein d'esprit que Paul Guth, dans son <em>Histoire de la littérature française</em> (livre trouvé à la maison, parcouru vers le début des années 2000), consacre à Rimbaud et où il se moque de sa volonté d'expériences pour être le voyant de la poésie française. Il aurait fallu, pour surmonter l'écran du mythe Rimbaud, une incitation forte. Ses poèmes les plus célèbres, que je relus plus tard,<em> Le dormeur du val, Voyelles, Ma bohême, </em>ne me parlaient pas. Même <em>Le bateau ivre, </em>dont j'apprécie davantage les sonorités, que mon père aime et dont il peut réciter de longs passages, me laisse sur le seuil. Je ne le comprends pas. La mélodie est pour moi une entrée dans la poésie : j'ai véritablement aimé des poèmes de Verlaine, de Baudelaire ou d'Aragon après les avoir entendu chantés ou chanté moi-même ; mais à ma connaissance Rimbaud a peu inspiré de compositeurs. Claudel, dont je crois n'avoir lu que quelques passages sur Rimbaud dans son <em>Journal </em>(lu en 2002), et Patti Smith (<em>Just kids</em>, lu en 2012) furent également impuissants à me communiquer leur amour pour sa poésie.</span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;">Ne trouverai-je jamais aucun passage vers cette œuvre ? Un essai lu en 2013 a éveillé mon intérêt pour Rimbaud : <em>Marcher, une philosophie</em>, de Frédéric Gros. Rimbaud était fugueur, il avait "la rage de fuir" écrit le philosophe (je reprends mon carnet de notes). Il était un grand marcheur, toujours sur le départ, homme prenant sous le coup de la colère la décision vide de tout laisser derrière lui et de reprendre la route. Frédéric Gros relève que, symptomatiquement, les médecins notèrent sur la fiche de décès qu'il était <em>de passage</em> à Marseille. Ce court portrait, qui parvient à unir les deux vies de Rimbaud, celle du poète et celle du marchand, me toucha infiniment plus que tout ce que j'avais pu lire avant sur lui. Peut-être ai-je enfin trouvé une entrée.</span></p>http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/1989-Arthur-Rimbaud%2C-Oeuvres-compl%C3%A8tes#comment-formhttp://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/feed/atom/comments/50