Le maillage des lectures - Mot-clé - BaudelaireAutobiographie de mes lectures.2022-03-07T20:19:23+01:00Véronique Hallereauurn:md5:6551cf8fc6b6706899240dddee7d97eaDotclear2005 - Pascal, Pensées (2)urn:md5:55272777760e7a704eca396d96727b3a2014-05-18T14:18:00+02:002021-03-26T16:16:42+01:00Véronique HallereauLectures d'âge adulteAntoine ArnaultBaudelaireJacques DrillonLittérature françaisePascalPaul ClaudelPhilosophiePierre NicoleProust<p><a title="Pascal" href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/lemaillage/public/Couvertures/.Pascal_s.jpg"><img width="65" height="100" title="Pascal" style="margin: 0 1em 1em 0; float: left;" alt="Pascal" src="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/lemaillage/public/Couvertures/.Pascal_s.jpg" /></a><span style='color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;'>Acheté en 2000, relu cinq ans plus tard. </span></p>
<p><span style='color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;'>Quand, en janvier 2004, je fis mes bagages pour un long voyage en Russie, qui officiellement devait durer un an mais qui était destiné à perdurer, je choisis quelques livres à emporter. Autant je suis incapable de répondre spontanément à la question des œuvres que j'emporterais sur une île déserte, autant par le choix que je fis à ce moment-là, j'ai un élément de réponse.</span></p> <p><span style='color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;'>J'allais à l'étranger, je choisis des œuvres dans mon esprit très françaises et propres à être feuilletées, lues par morceaux : <em>Les fleurs du Mal</em>, <em>Du côté de chez Swann</em>, <em>Connaissance de l'Est</em> de Paul Claudel (des poèmes en prose, comme j'avais commencé à en écrire), et les <em>Pensées</em>. Le choix fut bon car je les fréquentai tous pendant le temps que je restai là-bas.</span></p>
<p><span style='color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;'>J'emportai les <em>Pensées</em> et pourtant, ce fut par un détour que je les ouvris, plus d'un an après mon départ. Je gagnais ma vie en enseignant le français dans une école de langues, et devoir expliquer les règles de grammaire m'obligeait à les réviser et à approfondir leur connaissance ; le fait d'apprendre le russe, langue à la grammaire ardue, avec des déclinaisons, un système verbal très différent de celui du français, encourageait les comparaisons et cet approfondissement ; enfin, j'avais emporté le manuscrit du <em><a title="Soljenitsyne, un destin" href="http://vhallereau.net/portrait-litteraire.html" hreflang="fr"><strong>Soljénitsyne</strong></a></em>, que j'entrepris de relire l'été 2004 et de réécrire à la lumière des remarques d'un éditeur sur mon style. Tout cela m'incita à lire le <em>Traité de la ponctuation française</em> de Jacques Drillon - mais je ne sais comment j'entendis parler de ce livre - puis, ce dernier l'évoquant élogieusement dans son traité, j'achetai lors d'un bref séjour à Paris <em>La logique de Port-Royal</em> où Antoine Arnault et Pierre Nicole, grandes figures du monastère janséniste, nous apprennent à bien raisonner et donc à bien écrire. D'eux à Pascal, il n'y avait qu'un geste et je rouvris les <em>Pensées</em>.</span></p>
<p><span style='color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;'>Dans cette lecture, qui était le troisième, je fus plus attentive tant aux remarques sur le style qu'au style même de Pascal. J'admirai l'usage excessif à nos yeux et que les professeurs n'auraient pas manqué de réprouver, mais usuel à l'époque classique, de la conjonction "que" sans que la phrase en soit appesantie ni ralentie. J'admirai le rythme de sa prose, sa concision, sa densité. Le secret de son rythme réside dans les ruptures, la juxtaposition de phrases longues et courtes qui lui permet de tirer les conséquences de la remarque suivante : l'éloquence continue ennuie. Son art de la formule est si grand que l'on en garde tous en nous un certain nombre, devenues proverbiales. J'aime en particulier sa manière de tirer un mot dans plusieurs sens pour faire jouer ses nuances et nous faire entendre une vérité : la vraie morale se moque de la morale ; le cœur a ses raisons que la raison ignore ; l'homme est si ordinairement fou que ce serait être plus fou encore que de ne pas l'être (je cite de mémoire, sans exactitude, mais ce sont des phrases que je me répète souvent, et la dernière, je la relie directement à Swift et aux affreux chevaux rationalistes des <em>Voyages de Gulliver</em>). Pascal a l'art de voir tous les aspects d'une question, et de n'en laisser aucun de côté. Il n'est assurément pas un demi-habile ! Je partage sa joie quand, lecteur, il découvre derrière l'auteur, un homme : la lecture doit être une rencontre et ainsi qu'une rencontre, elle vous change. Je m'amuse de ses facéties contre ceux qui n'ont que moi, moi, moi, à la bouche, mon ceci, mon cela, qu'il compare à des bourgeois ayant pignon sur rue : c'est tout nous que je reconnais là, dans l'abus que nous faisons des possessifs.</span></p>
<p><span style='color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;'>Pourtant, si l'invocation continue de soi est haïssable, je ne le suivrai pas dans la critique de l'introspection à la Montaigne (le sot projet qu'il a de se peindre!). D'une part, ce serait contradictoire avec l'entreprise du <em>Maillage des lectures</em> qui s'inscrit dans une veine autobiographique ; et l'autobiographie n'est pas égocentrique quand elle reconnaît la porosité du moi, infini maillage de fécondations multiples, dont on peine à discerner l'intérieur de l'extérieur. Enfin, je ne le suivrai pas non plus dans la critique de l'imagination comme source d'illusion et de mensonge. Si l'imagination donne des ailes à la bêtise, en lui montrant tout ce qu'elle peut oser, elle participe également de l'intelligence et aide à penser. L'illusion provient bien davantage ou des erreurs de logique, ou des passions, pour reprendre un terme de l'époque classique, qui faussent la logique, par exemple en la poussant à bout. </span></p>
<p><span style='color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;'>Je suis certaine que ce ne sera pas là ma dernière lecture des <em>Pensées</em>.</span></p>http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/2005-Pascal%2C-Pens%C3%A9es-%282%29#comment-formhttp://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/feed/atom/comments/301990 - Voltaire, Candideurn:md5:4feed9179aeb02692a721f5fa90af4a82014-03-17T08:10:00+01:002021-03-26T16:44:57+01:00Véronique HallereauLectures d'adolescenceBaudelaireLeibnizLittérature françaiseSoljénitsyneVoltaire<p><a title="Candide" href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/lemaillage/public/Couvertures/.Candide_s.jpg"><img title="Candide" style="margin: 0 1em 1em 0; float: left;" alt="Candide" src="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/lemaillage/public/Couvertures/.Candide_s.jpg" /></a><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;">Pris dans la bibliothèque de ma sœur ?</span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;">C'est en cours de français de première que je lus <em>Candide ou l'optimisme</em>, une des œuvres de Voltaire au programme. Parmi les écrivains étudiés cette année-là, notre professeur préférait <a href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/2000-Pascal%2C-Pens%C3%A9es"><strong>Pascal</strong></a> et Baudelaire, et d'un XVIIIème siècle qu'il goûtait peu, il ne sauvait que Marivaux et Choderlos de Laclos.</span></p> <p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;">Il fit néanmoins son travail avec conscience et j'appréciai de faire sous son autorité une lecture de Voltaire plus active et plus riche que <a href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/1987-Voltaire%2C-Romans-et-contes"><strong>celle</strong></a> que j'avais faite toute seule trois ans plus tôt. Sans doute pas un hasard qu'elle seule me soit restée en mémoire. Ce fut une de ces lectures qu'on qualifie d'intéressantes : on y découvrait un peu un auteur, une pensée ; les aventures de Candide, Cunégonde et Pangloss ne suscitaient pas d'enthousiasme.</span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;">Je me rappelle avoir été agacée par la formule avec laquelle il caricaturait la philosophie optimiste de Leibniz, tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. Non que j'aurais connu la philosophie de Leibniz et aurais été irritée de la voir ainsi maltraitée : j'entendais son nom pour la première fois ; et je suis à peu près certaine que c'était là une opinion du professeur que je reprenais à mon compte. Cependant, même à celui qui n'avait pas lu une ligne de Leibniz, la charge caustique de Voltaire et son caractère injuste étaient détectables. Il lui opposait les milliers de victimes du tremblement de terre qui avait ravagé Lisbonne (et resté vaguement dans nos mémoires grâce à lui), événement qu'on ne pouvait décemment comprendre dans un monde harmonieux et indépassable, créé par un Dieu bon : penser ainsi reviendrait à justifier son laisser-faire, Dieu n'était pas intervenu pour éviter la catastrophe naturelle, et son indifférence aux souffrances humaines apparemment nécessaires à l'harmonie de la Création. Voltaire fait de son Pangloss, parangon de l'optimiste, un indifférent, qui devant les malheurs rencontrés ne cesse de répéter bêtement que tout est pour le mieux. Je me demande si ce n'est pas à Voltaire que l'on doit en France, ce pays où selon Baudelaire "tout le monde ressemble à Voltaire", la mauvaise réputation de l'optimisme, synonyme au mieux de naïveté et au pire d'idiotie béate et un rien monstrueuse. En tout cas, la question de la providence ou encore de la théodicée, pour reprendre le terme de Leibniz, soit la question de la justification du mal dans un monde créé par un Dieu bon et omnipotent, était posée, si nettement que dans mon souvenir c'est chez Voltaire que je la trouvai posée pour la première fois. J'aurai l'occasion d'y revenir car je lus un certain nombre de livres sur ce sujet, et l'œuvre de <a href="http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/1987-Alexandre-Solj%C3%A9nitsyne%2C-Une-journ%C3%A9e-d-Ivan-Denissovitch"><strong>Soljénitsyne</strong></a> me montrerait concrètement ce qu'est une vie placée sous le signe de l'optimisme et de la providence. Je n'aime pas les esprits qui font une fixation sur le mal. </span></p>
<p><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: "Cambria","serif"; font-size: 9pt; mso-fareast-font-family: "Times New Roman"; mso-bidi-font-family: "Times New Roman"; mso-fareast-language: FR;">Malgré tout, je ne suis pas insensible aux traits d'esprit de Voltaire et je garde en moi son conseil d'écrivain : "Le secret d'ennuyer, c'est de tout dire." J'aimerais d'ailleurs le lire pour examiner son style et sa correspondance me tente. Et je repense à </span><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: Cambria, serif; font-size: 9pt;">la célèbre morale qui clôt </span><em style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: Cambria, serif; font-size: 9pt;">Candide</em><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: Cambria, serif; font-size: 9pt;">, selon laquelle il ne reste qu'à "cultiver son jardin". Elle est sans doute la formule la plus achevée du sage individualisme qui n'attend pas de la politique qu'elle le sauve et se garde des idéologies comme des religions </span><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: Cambria, serif;">–</span><span style="color: rgb(51, 0, 51); font-family: Cambria, serif; font-size: 9pt;"> des enthousiasmes collectifs. Elle individualise l'injonction biblique et parie que par le travail, la maîtrise de son environnement immédiat, l'homme trouvera une source de progrès matériel et par conséquent, moral. Morale optimiste donc, qui rejoint celle des Lumières : le progrès par le commerce et par l'éducation. Ce Voltaire, quel candide.</span></p>http://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/post/1990-Voltaire%2C-Candide#comment-formhttp://lemaillagedeslectures.vhallereau.net/dotclear/index.php/feed/atom/comments/26